Cine
Chico y Rita De Fernando Trueba, Tono Errando, Javier Mariscal - Cuba - 2010 - 1h34min
Cuba, 1948. Chico, jeune pianiste talentueux, écoute les derniers airs de jazz venus d’Amérique, en rêvant de s’y faire un nom. De son côté, la belle et sauvage Rita essaie de gagner sa vie en chantant dans les clubs et les bals populaires, où sa voix captive toute l’assistance. Des bordels de la Havane à New York, en passant par Hollywood, Paris et Las Vegas, la musique et ses rythmes latinos vont les entraîner dans une histoire d’amour passionnée, à la poursuite de leurs rêves et de leur destinée.
Avec Bebo Valdés, Idania Valdés, Limara Meneses, Eman Xor Oña, Mario Guerra, Freddy Cole, Michael Phillip Mossman, Amadito Valdés, Germán Velazco
ILS EN PARLENT
" Le film (...) est (...) un hymne émouvant à la jeunesse perdue et à l’amour véritable et éternel. La Havane du début des fifties renaît, flamboyante et vibrante. Charlie Parker et Thelonious Monk apparaissent le temps de jam sessions fiévreuses dans un New York fantasmé. Avec une économie de mots et d’effets, Chico & Rita touche en plein coeur."
Christophe Narbonne, Première
" On suit leurs destins croisés sur une cinquantaine d’années, de La Havane à New York, de Paris à Las Vegas, sur fond d’histoire du jazz et de la musique cubaine.
Magnifique, la BO de Chico & Rita imprime son swing, son élan et sa mélancolie au film. Le dessin de Javier Mariscal est saisissant dans la représentation des lieux, produisant un rendu architectural et urbain de toute beauté, magnifiant les villes, leur typicité, leur mobilier urbain.
D’un bar ouvert sur rue de La Havane aux enseignes clignotantes de Broadway, des néons de Vegas à ceux de Cuba, d’un immeuble art déco aux enluminures haussmanno-parisiennes, le film est une véritable odyssée urbaine, un superbe hommage réaliste et stylisé à tout un pan de la pop culture du XXe siècle, englobant la musique, le graphisme, le design, l’architecture…
En revanche, le dessin se prête moins ici à l’incarnation des personnages. Aussi talentueux soit-il, un trait de crayon (ou de palette graphique) peut-il être aussi expressif ou complexe qu’un vrai visage ? Le cinéma, n’est-ce pas avant tout des corps et des visages humains ? Les vieilles questions baziniennes se reposent éternellement. Toujours est-il qu’on est ici peu touché par une histoire d’amour qui devrait être bouleversante et qu’on se dit qu’on le serait avec des acteurs de chair et d’os.
Cependant, cette supposée suprématie de la prise de vue réelle est mise en doute par la séquence finale, que l’on ne dévoilera pas, si ce n’est pour dire que cette émotion, qui n’était que théorique tout au long du film, finit par nous transpercer le cœur et le corps.
Swinguant et métissé, tonique et mélancolique, historique et intimiste, léger et plaisant, Chico & Rita est un bon cocktail estival. Tournée générale de cuba libre !"
Serge Kaganski, Les Inrockuptibles
" Chico et Rita sont les héros animés d’un film chaleureux, à la fois euphorisant et mélancolique, qui part de La Havane, passe par un Paris postexistentialiste, où toutes les filles ressemblent à Juliette Gréco, pour aboutir à un New York bleu métallisé, où, à la poursuite de Rita, débarquent, un beau jour, Chico et Ramon, son soi-disant imprésario. Tous deux se veulent aussi enthousiastes que Gene Kelly se lançant à l’assaut du show-biz dans une scène célèbre de Chantons sous la pluie, mais ils ressembleraient plutôt aux migrants d’Elia Kazan dans America, America : de pauvres petites silhouettes glacées, réchauffées soudain par la musique échappée d’une cave où joue, au milieu de la nuit, pour ses fans, encore peu nombreux, le grand Charlie Parker...
Visuellement, le film est inventif. Musicalement, c’est une petite merveille.
Un hymne à la modernité et à la gaieté de la musique latino (même l’enterrement d’un percussionniste célèbre est transfiguré par une samba frénétique...). Un hymne au jazz, aussi : comme le héros intègre les plus grands orchestres de l’époque, Trueba et Mariscal ont cherché des musiciens - le trompettiste Michael Philip Mossman ou le saxophoniste Jimmy Heath - capables de recréer la vitesse acrobatique de Dizzy Gillespie, ou la sensualité ouatée de Ben Webster. Réussite totale.
Quant à l’intrigue, elle rappelle les mélos hollywoodiens de jadis, ces histoires où les couples se quittent, se retrouvent et se quittent encore, victimes de leur orgueil, puis, lorsqu’ils s’acceptent enfin tels qu’ils sont, de la traîtrise inattendue d’un ami, ultime coup du sort.
On n’est pas très loin de Vincente Minnelli, de Douglas Sirk et de George Cukor. Notamment avec cette scène grandiose où Rita, devenue reine de Broadway, puis star à Hollywood, en dépit de sa couleur de peau, brise net sa carrière en dénonçant le racisme soigneusement caché de tous les hypocrites venus l’acclamer. On songe aux chanteuses blacks de l’époque, Billie Holiday en tête, triomphant dans des palaces, lesquels, parce qu’elles étaient noires, refusaient de les loger..."
Pierre Murat, Télérama
" Ce film est narré « à la manière d’un boléro qui, dans la culture latino-américaine, raconte toujours des histoires d’amour déchirantes », explique Javier Mariscal, co-réalisateur et dessinateur de renom. Évocation nostalgique de cette période, Chico Rita multiplie les clins d’œil au cinéma de l’époque sans oublier d’évoquer les discriminations raciales dont étaient victimes les populations noires.
Inspiré de la vie de Bebo Valdés, le film est né de la rencontre avec cet immense pianiste cubain qui a prêté sa voix au personnage de Chico. En 2000, grâce à son documentaire musical Calle 54, Fernando Trueba a relancé la carrière de cet artiste qui avait quitté Cuba pour la Suède au moment de la révolution castriste. Amoureux de « latin jazz », qui combine des rythmes latino-américains avec des harmonies de jazz, le cinéaste espagnol a voulu faire revivre à l’écran des musiciens célèbres comme Chano Pozo, Charlie Parker ou Nat King Cole. Il y parvient par la grâce d’une animation fluide et organique, dont le tempo est rythmé par une bande-son magnifique composée et enregistrée spécialement pour le film entre New York, La Havane et Madrid. Malgré une trame parfois un peu bancale, se dégage de ce mélodrame chaloupé un charme envoûtant où chaque dessin est lié à une note de musique."
Stéphane Dreyfus, La Croix