Violences barbares en milieu scolaire : quand l’inadmissible devient routine

(actualisé le ) por (Bernard Boriello)

Ce blog n’a pas pour vocation de commenter les faits divers, même lorsqu’il s’agit de violences exercées dans des enceintes scolaires. Mais les agressions à répétition dont sont victimes les enseignants devraient nous amener à nous poser un certain nombre de questions, jamais abordées par notre hiérarchie ni par nos représentants, censés défendre nos droits : "Comment avons-nous pu tomber si bas ? Qui nous a fait tomber si bas ? Qui sont les fauteurs de trouble ? Pourquoi toujours cette même culture de l’excuse pour les uns et la culpabilisation infantilisante pour les enseignants ? Pourquoi l’éradication de la violence n’a-t-elle jamais été considérée par la communauté éducative comme une condition première d’exercice de notre métier ?
A quels étranges conditionnements les enseignants ont-ils été soumis pour subir de telles avanies sans se rebeller ? Ultime question : face à un tel déni de réalité, est-il possible que les enseignants soient uniquement des victimes ou n’ont-ils pas leur part de responsabilité ?

Addendum : 24 H après avoir écrit cette dernière phrase, je lis dans la presse :
"IL M’A BRISÉ LE CŒUR"

L’enseignant de 36 ans, qui n’a pas souhaité donner son nom, a expliqué être "totalement indemne" physiquement mais "très amer" moralement, quarante-huit heures après son agression, due selon lui essentiellement à un "raidissement" momentané de son élève, en proie à des difficultés familiales et personnelles. "Il ne m’a pas cassé la gueule, mais il m’a brisé le cœur", a déclaré l’enseignant, qui dit éprouver un "sentiment de trahison" de la part d’un élève qu’il apprécie particulièrement, et qui en plusieurs occasions par le passé l’avait même aidé à "tenir la classe".

Le professeur a dit qu’il avait revu son élève à l’issue de la garde à vue de ce dernier, et lorsque celui-ci lui a présenté ses excuses, il a eu "l’impression de voir Dr Jekyll et M. Hyde". Pour autant, l’enseignant a affirmé ne vouloir "ni minimiser ni exagérer" l’importance du sujet du cours, c’est-à-dire le fait religieux.

Cela renvoie selon lui à des "problématiques complexes" – "la croyance et le savoir", "l’autorité", la "laïcité" à l’école – qu’il souhaiterait aborder avec son ministre de tutelle, afin de provoquer si possible un débat, a-t-il ajouté. "Je ne suis pas de nature à me laisser abattre", a-t-il dit, affirmant aussi qu’il voulait "éviter à tout prix une récupération politique" de cet incident".

La jobardise de cet enseignant est donc bien la preuve que nous avons ce que nous méritons !

Violence scolaire : un professeur d’un lycée à Bordeaux roué de coups par un élève

Le Monde.fr avec AFP | 13.09.2012 à 10h27 •

Un enseignant d’un lycée professionnel de Bordeaux a été roué de coups par un de ses élèves, âgé de 18 ans, à l’issue d’un désaccord lors d’un cours évoquant le système politique du Maroc, a indiqué la direction jeudi.
L’élève du lycée Trégey à Bordeaux a assené mardi après-midi à son enseignant des claques et des coups avant d’être interpellé, selon la police. Le proviseur du collège Dominique Margueritat a évoqué un différend qui a surgi pendant un débat en cours sur le "système politique du pays dont est originaire l’élève, le Maroc", une "situation pédagogique banale n’ayant rien à voir avec la religion". Selon lui, l’élève a voulu approfondir le débat et l’enseignant a refusé et sa colère aurait été provoquée par le fait que le professeur a menacé de prévenir son père. Selon une source proche de l’enquête en revanche, "ils auraient été en désaccord sur certaines personnalités du monde arabe", "mais il ne semble pas qu’il y ait eu de provocation" de la part de l’enseignant.

Il s’agit de la deuxième agression connue d’un enseignant depuis la rentrée, alors que mardi également une professeure a été giflée par la mère d’un élève en désaccord avec une remarque dans son cahier de correspondance, au collège Jules-Verne de Buxerolles, près de Poitiers.

COMPARUTION DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

L’élève bordelais doit faire l’objet d’une comparution dans les prochains mois devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour "violences sur personne chargée d’une mission de service public et dégradations". Le ton serait monté très vite entre l’enseignant et l’élève qui s’en est pris, dans un premier temps, au mobilier de la classe. Les autres élèves ont alors été évacués et le lycéen a été convoqué chez le conseiller principal d’éducation. Très énervé, il s’en est pris au mobilier en apprenant que ses parents avaient été avertis de l’incident. En sortant du bureau, il a croisé le professeur qu’il a roué de coups avant de s’en prendre à une surveillante qui tentait de s’interposer.

L’enseignant, "très choqué", était absent de l’établissement jeudi, selon le proviseur.
"Je suis choquée par ce qui s’est passé", a aussi déclaré une représentante de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) pour ce lycée. L’établissement, un bâtiment récent situé dans un quartier populaire de Bordeaux, a "une réputation mouvementée" mais "le fait qu’un élève pète ainsi les plombs est sans précédent", selon cette mère d’élève. Des lycéens n’ayant pas assisté à la scène ont expliqué à un journaliste de l’AFP que le soir même ils avaient été informés de cette agression, sans pour autant en connaître la nature et la raison.

Selon un de ces élèves, âgé d’une vingtaine d’années, dès mercredi "un mot a circulé dans les classes disant qu’il y a eu des violences verbales et physiques perpétrées à l’encontre d’un professeur, expliquant que c’était inadmissible et que des sanctions seraient prises".

DROIT DE RETRAIT

A Paris, le Front national a tenu à apporter "son plus entier soutien" au professeur bordelais "tabassé par un de ses élèves après un cours sur les religions, ainsi qu’à l’ensemble des enseignants confrontés au même type de violence", selon Florian Philippot, vice-président du parti d’extrême droite.

Pendant ce temps, les enseignants du collège Jules-Verne de Buxerolles ont décidé jeudi lors d’une assemblée générale de ne pas reprendre les cours, pour protester contre l’agression dont a été victime leur collègue mardi, a indiqué la direction à un correspondant de l’AFP. L’auteure de la gifle était pour sa part toujours en garde à vous jeudi.

Le ministre de l’éducation nationale, Vincent Peillon, a jugé "inacceptables" les deux agressions dont ont été victimes des enseignants et "fermement" condamné le recours à la violence, en marge d’une réunion sur la refondation de l’école, jeudi à Orléans (Loiret). "Je voudrais dire de façon solennelle qu’il est inacceptable que des fonctionnaires, en l’occurrence des professeurs, puissent être agressés dans l’exercice de leurs fonctions. De ce point de vue, je condamne fermement toutes les agressions passées et à venir", a-t-il déclaré à l’issue d’une rencontre avec des enseignants au lycée Voltaire à Orléans.

http://www.lemonde.fr/education/article/2012/09/13/violence-scolaire-un-professeur-d-un-lycee-a-bordeaux-roue-de-coups-par-un-eleve_1759414_1473685.html