Le chômage espagnol atteint un taux record LEMONDE.FR avec AFP | 29.04.11 |

Le chômage en Espagne a grimpé de près d’un point au premier trimestre, à 21,29 %, ce qui constitute un taux inédit depuis début 1997. En guise de réponse, le gouvernement doit approuver vendredi 29 avril un nouveau plan contre le travail au noir.

OFFICIELLEMENT, PRÈS DE 5 MILLIONS DE CHÔMEURS

Fin mars, le pays s’approchait du chiffre symbolique des 5 millions de chômeurs, avec 4,91 millions de demandeurs d’emploi, a annoncé l’Institut national de la statistique. Avec un taux de 21,29 %, le chômage égale presque le niveau du premier trimestre 1997 (21,30 %) et reste le plus élevé parmi les pays de l’OCDE.

Ce chiffre est publié le jour où le conseil des ministres doit approuver un plan pour lutter contre l’économie souterraine, qui représenterait près du quart du PIB du pays et quelques millions d’emplois non déclarés.

LE TRAVAIL AU NOIR REPRÉSENTE ENVIRON 20 % DU PIB ESPAGNOL

Une étude publiée début mars par la Fondation des caisses d’épargne espagnoles chiffrait le travail au noir à 17 % du PIB et 4 millions d’emplois. Le syndicat des techniciens du ministère du budget l’estime à 23,3 % du PIB, soit quelque 245 milliards d’euros, dont deux tiers (161,5 milliards) de fraude fiscale. Une troisième étude, publiée fin 2010 par Visa Europe, faisait un calcul similaire, évaluant l’économie souterraine à 205 milliards d’euros en 2009, soit 20 % du PIB espagnol.

"La taille de l’économie souterraine en Espagne est parmi les plus élevées en OCDE, avec le Portugal, la Grèce et l’Italie", explique Javier Diaz-Gimenez, économiste à l’IESE Business School, qui l’explique par la faiblesse des contrôles et sanctions, combinée à des coûts du travail élevés, susceptibles d’inciter à l’illégalité.

"Clairement, avec tant d’économie souterraine, tous les chiffres [officiels] sont falsifiés", remarque-t-il, ce qui "peut enlever 2, 3 ou 4 points au taux de chômage."

"Le taux de chômage réel n’est sûrement pas de 20 %", renchérit Carlos Sebastian, professeur d’économie à l’Université Complutense de Madrid. "Je dirais qu’il est entre 10 et 15 %", avance-t-il, citant les trois secteurs propices au travail au noir : la construction, particulièrement importante en Espagne, les services et l’agriculture. Cela pourrait expliquer l’absence de protestation sociale majeure, alors que 1,39 million de foyers espagnols comptent officiellement tous leurs membres au chômage.

UN FREIN À LA CROISSANCE

Difficile de connaître l’impact exact de l’économie souterraine sur le taux de chômage, car des personnes travaillant au noir peuvent tout aussi bien se déclarer comme travailleurs légaux (ce qui peut être vrai, s’ils cumulent activités légale et illégale), demandeurs d’emploi ou inactifs.

Deux effets sont avérés: "moins de recettes fiscales" pour l’Etat et "une sous-valoration du PIB", souligne Carlos Sebastian.

Des conséquences préjudiciables pour l’économie espagnole, qui peine à se relever de la crise, avec une croissance atone (-0,1% en 2010), et alors que le gouvernement s’est engagé dans une forte réduction des déficits publics, visant 6% en 2011 contre 9,2% en 2010.

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