DÉJÀ DEMAIN

Apprendre les langues au collège sur MP3

LE MONDE | 05.07.08 | 14h05

Les enquêtes l’attestent : entre la culture jeune et la culture scolaire, le fossé s’élargit. Alors que les adolescents utilisent largement le numérique dans leurs loisirs, les enseignants, eux, peinent à intégrer les nouvelles technologies... Dans l’académie de Bordeaux, pourtant, l’apprentissage des langues, baladeurs MP3 à l’appui, préfigure déjà la pédagogie de demain.

"Je trouvais passionnant de détourner un objet purement ludique et emblématique de la culture jeune à des fins pédagogiques", explique Domingo Bayon Lopez, professeur d’espagnol au lycée François-Mauriac. Dès 2004, il décide d’exploiter la propension des jeunes à porter autour du cou leur musique préférée. L’utilisation du MP3, prêté à l’élève par l’établissement scolaire, permet une pratique plus intensive de l’oral, grande faiblesse de l’apprentissage des langues étrangères en France.

Quand les 35 élèves d’une même classe ne sont pas assurés de s’exprimer cinq minutes par semaine, le baladeur leur permet de charger un document sonore de travail, mis en ligne par l’enseignant sur le site de l’établissement scolaire. A partir de celui-ci, selon les consignes du professeur, ils produisent leurs propres fichiers son en s’enregistrant, voire en s’exerçant à la conversation avec leurs camarades de classe. A 20 euros l’unité, il est facile de constituer un laboratoire nomade de langue qui permet à chacun de travailler selon son niveau, en tout lieu et à toute heure.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, la pratique s’est répandue dans les collèges, où elle concerne désormais quelque 3 000 élèves. "Ils apprennent à s’exprimer sans s’en apercevoir, et acquièrent un bagage lexical plus rapidement qu’avec les méthodes traditionnelles", constate Maitena Susperrigui, enseignante d’espagnol et chargée de mission sur les nouvelles technologies dans le département.

D’autres académies - celles de Montpellier et de Dijon - se sont emparées du dispositif. Mais son usage, où que ce soit, reste soumis à la démarche volontaire de l’enseignant. La pratique reste donc à généraliser. Membre très actif de Cyberlangues (1), association d’enseignants de langues étrangères promouvant les nouvelles technologies, M. Lopez rêve du jour où le candidat au baccalauréat pourra se présenter devant son examinateur avec ses fichiers sons, et non avec les photocopies de textes à commenter. L’élan, alors, serait irréversible.

Christian Bonrepaux
Article paru dans l’édition du 06.07.08

http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/07/05/apprendre-les-langues-au-college-sur-mp3_1066841_3224.html#ens_id=1065757


(1) http://www.cyber-langues.asso.fr/