Les Espagnols pris à la gorge par la crise immobilière

Ils sont de plus en plus nombreux à devoir vendre ou louer leur appartement.

Diane Cambon. 08/04/2008. Madrid

La crise de l’immobilier en Espagne est désormais visible à l’œil nu. Presque toutes les rues de la capitale ou des grandes villes du pays sont ornées des fameux panneaux oranges «se vende» (à vendre) ou «se alquila» (à louer). Dans certains quartiers résidentiels, c’est même tout un pâté de maisons qui est mis en vente.

Seseña, une ville nouvelle construite en 2003 au sud de Madrid, au milieu de la plaine castillane, incarne à merveille le désenchantement du secteur immobilier. Ce projet, le plus ambitieux d’Espagne avec 13 503 logements, est aujourd’hui une ville fantôme. Seules 750 personnes y résident. Sur quasiment l’ensemble des balcons flotte la même banderole : «A vendre». Symbole de la spéculation immobilière, Seseña a été achetée par des investisseurs désireux de toucher un pactole lors de la revente de leurs biens. Mais le ralentissement économique, la hausse des taux d’intérêts et la baisse des prix du logement ont coupé court à leurs rêves. Résultat, des centaines de petits propriétaires se retrouvent avec un appartement sur les bras et un crédit hypothécaire de plus en plus difficile à rembourser.

A en croire une récente étude de l’agence Standard & Poor’s (S & P), les ventes ont chuté de 27% en Espagne ces derniers mois. Alors que jusqu’ici, les appartements s’arrachaient comme des petits pains, beaucoup de propriétaires patientent désormais au minimum six mois avant de réussir à céder leurs biens. C’est le cas de Santiago, qui vend 109 mètres carrés pour 203000 euros dans une résidence de Seseña. C’est près de 5% de moins que la somme qu’il avait déboursée pour acheter l’appartement en 2005. «Je perds de l’argent sur la vente, mais surtout je ne peux plus rembourser mon crédit immobilier à cause de la hausse des taux d’intérêts, or mon banquier refuse de prolonger mon crédit», explique ce trentenaire.

Le coût du crédit s’envole

Pour d’autres Espagnols de la classe moyenne, la vente ou la mise en location de leur appartement est une question de semaines. Sandra, qui a acheté il y a six ans un deux-pièces dans le quartier madrilène de La Latina, doit aujourd’hui songer à le céder. Comme 98% des Espagnols, son crédit immobilier est à taux variable. Durant trois ans, elle a pu rembourser 600 euros de crédit mensuel avec son salaire de 1800 euros. Or, depuis deux ans, Sandra a été contrainte de mettre son coquet appartement en location afin de faire face à la hausse de son crédit immobilier, passé à 750 euros par mois. La situation s’est aggravée ces derniers mois avec une hypothèque qui est montée à 820 euros. «Je ne peux pas louer plus cher mon appartement, alors je vais devoir le vendre avant que les prix ne s’effondrent et me fasse perdre tout le bénéfice», raconte cette jeune femme, qui vit aujourd’hui avec son ami dans la banlieue sud de Madrid.

Avec une chute des prix du logement de 3,08% en 2007 après une hausse moyenne de 12,8% au cours des six années passées, l’immobilier n’est plus une valeur refuge. D’après la banque BBVA, le réajustement des prix de l’immobilier résidentiel devrait se poursuivre sans que n’éclate pour autant la bulle immobilière. Mais si on en croit un récent rapport du FMI, la correction devrait être plus douloureuse, puisque le prix du logement en Espagne est surévalué de 20%.

http://www.lefigaro.fr/immobilier/2008/04/08/05002-20080408ARTFIG00261-les-espagnols-pris-a-la-gorge-par-la-crise-immobiliere-.php